Goulven Marie, au départ de la Med Max
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Goulven Marie, skippeur de la Lagoped Family, a pris un nouveau départ : celui de la Med Max. Récit d'une course en double aux côtés de Nasser Arraiss, par le journaliste Laurent François.
Ultimes réglages, rangement du bateau, préparation des voiles... Et, enfin, à 11h, l'appareillage du quai du port de Port-Camargue pour rejoindre la zone de départ : Qwanza Bexa a pris ce dimanche 29 septembre, le départ de la première édition de la Med Max. Les 16 Class 40 engagés dans l'épreuve vont s'affronter sur un parcours d'environ 700 milles nautiques, soit presque 1400 km. Après avoir viré une bouée devant Sète, ils mettront le cap sur les îles Baléares. Ils devront alors passer au sud-est de Minorque, avant de faire route à l'ouest, de franchir la passe entre Ibiza et Formentera, puis de mettre le cap sur Saïdia, au nord-est du Maroc. C'est là que sera jugée l'arrivée.
Gonflés à bloc, Goulven et Nasser comptent sur leurs connaissances de la navigation en Méditerranée et ses conditions météos particulièrement changeantes pour faire la différence. Quelques minutes avant d'appareiller, ils affichaient, en tout cas, un moral d'acier et une motivation hors norme. Ils comptaient atteindre Minorque dans deux jours, soit mardi 2 octobre. Si bien entendu Éole ne s'endort pas !
La bataille fait rage dans cette première édition de la Med Max, partie ce dimanche 29 septembre de Port-Camargue. Et à bord de Qwanza Bexa, Goulven et Nasser ne chôment pas. Dès le départ, se positionnant en tête, ils ont montré qu'ils ont les armes pour rivaliser avec les meilleurs. Ils ont d'ailleurs été devant jusqu'au moment où ils se sont retrouvés au large de Palavas : "Le vent est rentré par notre gauche et nous était moins favorable, raconte Goulven. Du coup, ceux qui étaient moins en côte que nous ont été favorisés et nous avons glissé vers l'arrière du classement. Mais nous sommes toujours au contact. C'est notre objectif. C'est la raison pour laquelle nous ne prendrons pas d'options radicales."
En fin d'après-midi, ce lundi 30 septembre, en fin d'après-midi, Qwanza Bexa était au coude à coude avec les autres "pointus"(*) engagés sur l'épreuve. Goulven et Nasser étaient à une quarantaine de milles du cap Cavalleria, situé au nord de Minorque. Ils avançaient à 7 nœuds, par un vent de sud-ouest de 9 nœuds et une mer plate : "C'est un pur bonheur, assuraient Goulven. Nous sommes à 25 milles des premiers qui sont des "scows" (*). Nous naviguons à vue. Mais rien n'est fait. La nuit prochaine sera très technique."
Qwaza Bexa devrait passer le sud-est de Minorque vers 3 h du matin ce mardi 1ᵉʳ octobre.
(*) Il existe deux types de Class 40. Ceux ayant une étrave en v, dite "pointue" comme c'est le cas de Qwanza-Bexa et ceux qui ont une étrave arrondie, plus modernes, les scows. Ils sont globalement plus rapides, notamment aux allures portantes. Sur al Med Max il sera établi un classement pour les deux catégories.
À bord de Qwanza Bexa, qui a atteint Minorque la nuit dernière et se situait au sud de Majorque en début de soirée, il faut avoir les nerfs particulièrement solides. Goulven et Nasser ont longtemps dû composer avec un Eole pas vraiment en grande forme qui les a obligés à manœuvrer constamment, tout en prenant leur mal en patience : "Nous n'avons pas eu de réussite avec les changements de direction de vent, regrettait Goulven à la mi-journée. Chaque fois que nous sommes revenus sur les bateaux de devant, un scénario défavorable s'est mis en place. Ce matin, nous pensions pouvoir doubler quatre bateaux avec une bascule du vent à l'est et il a tourné au sud..."
Malgré leurs déboires, les deux marins demeuraient au contact de la flotte. Sachant que la direction de course a pris la décision de rallonger le parcours avec, après avoir franchi la passe entre Majorque et Formentera, une remontée vers les îles columbretes, au large de Valencia. De quoi pimenter un peu plus la bataille !
"C'est toujours pareil depuis que nous avons atteint les îles Baléares, les premiers passent directement et nous, nous nous retrouvons à tirer des bords !" Goulven et Nasser composent depuis 48 heures avec un Éole, on ne peut plus capricieux. S'il est, en effet, favorable aux équipages qui ont pris la tête des opérations, derrière, c'est un véritable casse-tête. À commencer à bord de Qwenza Bexa qui a enclenché le turbo ce jeudi 3 octobre avant de revoir sa copie, une énième fois : "Après le passage des îles columbretes, nous avons pris 30 nœuds de vent au portant, expliquait Goulven ce jeudi matin. Nous avons rattrapé le groupe de devant en pariant sur le fait de rester dans la veine de vent le plus longtemps possible. Mais cela n'a pas été forcément payant. Ceux qui sont restés en côte s'en sont mieux sortis."
Pas de quoi, toutefois, entamer le moral des troupes, Goulven et Nasser recollant sur les bateaux de devant en début de soirée.
En début de nuit, Goulven et Nasser étaient à environ 125 milles de l’arrivée au Maroc. Et ils cherchaient toujours désespérément les faveurs d’Éole.
De quoi prendre son mal patience et refaire le match : « Nous avons regardé la cartographie en accéléré pour voir où nous avions raté le coche, explique Goulven. On voit bien qu'après avoir viré les îles Colombrette, nous avons pris une route nord plus tôt que ceux de devant qui ont pu rester collés à la côte en bénéficiant d’un vent d’ouest. »
Qwanza Bexa devrait couper la ligne d’arrivée ce samedi.
À bord de Qwanza Bexa, Goulven et Nasser savourent chaque souffle d’un Éole qui aura vraiment décidé de compliquer la tâche pour les bateaux en queue de peloton. Chacun doit lutter d’arrache-pied pour faire avancer le voilier. En fin de journée, Goulven et Nasser pointaient ainsi à 60 milles de l’arrivée dans un vent assez poussif et ils tiraient des bords…
Ils devraient toucher terre au petit matin. Si Éole ne s’endort pas…
L’aventure est donc terminée pour Goulven et Nasser qui ont vraiment dû batailler jusqu’au bout. Le vent était aux abonnés absents ces dernières heures. Qwanza Bexa s’est même retrouvé à l’arrêt complet, Éole s’offrant une sieste un peu trop longue au goût de l’équipage. Fort heureusement, Goulven et Nasser, qui ont franchi la ligne peu après 17h, ont pu bénéficier d’un accueil hors pair de la part des Marocains. De quoi récupérer avant bien entendu de reprendre le large !
Après une courte pause, Goulven va reprendre la mer et s'aligner à la Rolex Middle Sea Race dont le départ sera donné le 19 octobre.
Il revient sur la Med Max, où avec Nasser, ils ont vécu des moments forts et inoubliables :
Quel bilan tires-tu de cette Med Max?
Le bilan est extrêmement positif. Être au départ de cette course après toutes les aventures que j'ai vécues ces derniers mois (démâtage pendant la Transat CIC, NDLR) était déjà une victoire. Humainement, la rencontre avec Nasser, qui est un bon marin, a été fabuleuse.
Un nouveau mât, de nouveaux réglages… As-tu trouvé le bateau plus performant ?
Le bateau va vite, surtout dans le petit temps. Les nouvelles voiles sont très bien coupées. Et, cerise sur le gâteau, la décoration donne un super look à l’ensemble. C'est très photogénique !
Quel a été pour vous le meilleur moment lors de cette course ?
Le départ et l’arrivée ont été des moments inoubliables. Nous avons gagné le départ, mais dans l’euphorie, nous avons oublié de nous recentrer quand la brise est rentrée.
A contrario, quels sont vos regrets ?
Nous n'avons pas été très inspirés au niveau de nos choix stratégiques. Les moments de transition entre deux systèmes météo font aussi partie des détails qu'il faudra travailler.
Comment as-tu trouvé l’accueil des Marocains ?
L’accueil a été extrêmement généreux. Cela a été un vrai plus, évidemment, d’avoir Nasser à bord. Les autorités marocaines ont apprécié qu’un Marocain participe à la course. Il y a une véritable volonté politique, au Maroc, de développer la voile et la Med Max a été une aubaine pour tout le monde.
Comment s'annonce la suite ?
Nasser reste un peu de temps avec sa famille. Quant à moi, je repars avec un ami pour participer à la Rolex Middle Sea Race qui a lieu à Malte. C'est une course très prestigieuse qui va réunir plus d'une centaine de voiliers, dont des Class 40. Régater dans de telles conditions va permettre de continuer à progresser en situation de course au contact et de prendre du rythme.