Au coeur de la Transat Jacques Vabre

Écrit par : Christophe Cordonnier

|

|

Temps de lecture 32 min

Vivez la Transat Jacques Vabre au coeur de l'aventure avec l'équipage Qwanza avec Goulven et Nicolas, version carnet de bord.


29 Octobre 2023

C’est parti ! En début d'après-midi, Qwanza a enfin largué les amarres en direction de Lorient, où la flotte des Class 40 fera halte en attendant que la tempête annoncée dans les jours à venir soit passée. En arrivant dans le port breton, ce seront environ 300 milles nautiques (quasiment 600 km) qu'auront parcouru Goulven et Nicolas. Et cela ne devrait pas être de tout repos. Les prochaines heures de course, il va leur falloir négocier un vent de sud-ouest, dont les rafales pourraient atteindre 40 nœuds, soit presque 80 km/h. Quant à la mer, elle sera assez hachée avec des vagues de 2 à 3 m. Déjà, Éole était en grande forme, ce samedi 29 octobre, en début d'après-midi, lorsque les 44 Class 40 se sont élancés du Havre. Le départ a été donné par 20 à 38 nœuds de vent. De quoi donner le ton de cette première étape. Alors que certains concurrents, qui ont rencontré des problèmes,ont même été contraints de rebrousser chemin, à bord de Qwanza, on a choisi, dans un premier temps, de ne pas prendre de risques inutiles et de contrôler les adversaires directs. En sachant que la route est encore très longue jusqu'à l'île de la Martinique. D'ailleurs, la mer qui est particulièrement hachée n'a pas épargné le bord : une vague est venue endommager le hublot situé à l'avant sur le pont. Une possible et dangereuse rentrée d'eau. S'il a perdu beaucoup de temps, l'équipage a réagi immédiatement et est parvenu à réparer la voie d'eau. La nuit va être longue mais le duo de choc garde un moral d'acier. Au pointage de 19 h 45, alors que les bateaux naviguaient à vue, à une moyenne de 10 nœuds, Qwanza qui reprenait peu à peu de la vitesse après son avarie, était ainsi classé en 39e position.


30 Octobre 2023

La première nuit passée en mer après le départ donné, dimanche, au Havre, n'a pas été de tout repos à bord de Qwanza. Goulven et Nicolas ont vécu dans une ambiance "machine à laver" avec un vent de face avoisinant 20 à 35 nœuds (38 à 65 km/h) et une mer particulièrement hachée avec des creux de 2 à 3 m… Il leur a fallu encaisser le mauvais temps sans rechigner. Mais pas sans serrer les dents : les coups de butoir engendrés par ces conditions météos leur ont coûté la perte de leur antenne radar, le hublot situé à l’avant de leur pont a été sérieusement endommagé et ils ont déchiré leur voile d’avant… Un moindre mal si on se réfère aux cinq concurrents qui ont déjà dû jeter l’éponge pour cause de dommages sur leur bateau, l’un d’entre eux ayant même démâté. Au sein de la meute des Class 40, Qwanza qui a d'abord fait une route plus nord que la majorité des concurrents, afin d'aller chercher les faveurs d'Eole, reste au contact du gros de la flotte, située à une trentaine de milles devant eux. Le premier des 44 Class 40 engagés devrait atteindre le port de Lorient dans la nuit. Au pointage de 16 h, Qwanza, qui naviguait dans une mer toujours très cassante, était pointé en 35e position. Un classement qui pourrait évoluer en sa faveur, les bateaux de devant se trouvant dans l'obligation de tirer des bords, alors que Qwanza fait désormais une route plus directe vers l'île d'Ouessant. Ils devraient toucher terre demain matin.

31 Octobre 2023

Goulven et Nicolas sont arrivés à bon port ce mardi 31 octobre. Ils ont rejoint Lorient en tout début d'après-midi. Qwanza a coupé la ligne d'arrivée après exactement 1 jour, 22 heures, 47 minutes et 54 secondes de course et un périple de plus de 300 milles nautiques. Il s'est classé à la 38e place : "Nous n'avons pas voulu prendre le risque de faire du rase cailloux, de nuit, dans le chenal du Four, en bordure de l'île d'Ouessant, ni dans le raz de sein, où il était dangereux de jouer avec le feu avec un coéfficient de marée de 115 engendrant un fort courant, expliquait Goulven à son arrivée, fatigué mais déjà prêt à repartir au front. Ce mardi matin, nous avons donc logiquement recroisé le gros de la flotte derrière. Pas vraiment grave puisqu'il reste 4000 milles à parcourir jusqu'à la Martinique." De quoi en effet remettre les pendules à l'heure. Mais en attendant, c'est repos pour les deux navigateurs qui vont pouvoir remettre Qwanza d'aplomb et le soigner de ses petits bobos après ces deux jours de mer musclés. Il va falloir aussi se mettre à l'abri, la tempête Ciaran arrivant rapidement sur la façade atlantique.



01 Novembre 2023

Arrivés au port de Lorient, mardi 31 octobre, où ils ont été amarrés dans un bassin proche de la ville, Goulven et Nicolas ne se sont pas accordés beaucoup de repos. La journée de ce mercredi 1er novembre étant fériée et les magasins d'accastillage nautique fermés, il leur a fallu rapidement se mettre en quête du matériel nécessaire pour réparer les petits bobos de Qwanza. En sachant qu'il leur faudra être prêts à larguer les amarres lorsque le mauvais temps sera passé. Même si l'organisation annonce que "ce ne sera pas avant lundi 6 novembre", plus tôt le bateau sera prêt, plus tôt l'équipage pourra se concentrer sur la deuxième étape qui les conduira jusqu'en Martinique, après avoir parcouru 4 000 milles.

Bref, Goulven et Nicolas ont dû sortir la trousse à outils : "Le hublot s'est désaxé et ne fermait plus sur l'avant, raconte Goulven en revenant sur les avaries qu'ils ont rencontrées. Avec les vagues qu'il y avait, nous prenions donc l'eau. Nosu avons réalisé une réparation de fortune. Et dans 3 m de vagues, ce n'était pas évident ! Le foc s'est aussi déchiré tout le long de son nerf de chute. Le bateau tapait comme si on tirait dessus à coup de fusil. C'était incroyable. Le support qui tenait le radar sur le mât s'est également brisé et le radar est tombé sur le pont. Avec le bruit, nous n'avons rien entendu. Nous avons eu de la chance car il a roulé vers l'arrière et nous l'avons retrouvé au niveau du hublot. Le régulateur de charge du moteur est aussi tombé en panne." Mardi soir, les deux marins estimaient qu'ils devraient pouvoir tout réparer dans les temps.

Côté navigation, Goulven et Nicolas, qui confient ne pas "avoir trop mangé" pendant la première étape, se disent satisfaits : "Le bilan est très positif, assure Goulven. Nous aurions pu, peut-être, être mieux classés mais nous avons fait le choix de ne prendre aucun risque contrairement à d'autres qui ont eu beaucoup de casse. Cette étape va nous permettre de fiabiliser encore plus le bateau. Nous avons aussi pris nos marques par rapport au reste de la flotte. En terme de vitesse, à part deux bateaux qui vont vraiment très vite, nous avons pu voir que nous pouvons être au contact de ceux qui ont la même carène que Qwanza. Je pense sincèrement si nous naviguons correctement que nous pouvons aller chercher une place dans les 20-30. " Un objectif tout à fait jouable pour un équipage qui commence à très bien se connaître, avance main dans la main et est surtout sur la même longueur d'onde.

02 Novembre 2023

Goulven et Nicolas commencent déjà à trouver le temps long. Arrivés à Lorient, mardi 31 octobre, ils se sont immédiatement mis à réparer les petits dommages que les rudes conditions de navigation ont causé à Qwanza. Mais ils songent déjà toutefois déjà repartir : « Le plus difficile est l’attente, ne cache pas Goulven. Nous espérons avoir très vite une date de départ. » En sachant que l’organisation leur a fait savoir que cela ne devrait pas être avant mardi. Si bien entendu, les prévisions météo n’évoluent pas dans le mauvais sens… Ce jeudi, les deux compères ont rallié Carnac depuis Lorient afin d’amener leurs voiles chez un maître voilier qui va remettre en état tout ce qui a souffert. Dès l’après-midi, ils sont revenus au port où ils se sont remis à travailler sur le bateau qui a été amarré en sécurité, l’amarrage ayant été doublé pour le cas où la tempête Ciaran s’abattrait sur Lorient.

03 Novembre 2023

Si le temps demeure maussade du côté de Lorient, Goulven et Nicolas gardent le sourire. Les travaux de remise en état du bateau avancent selon le calendrier qu'ils se sont fixés et ils commencent à voir le bout du tunnel. Ce vendredi 3 novembre, ils ont récupéré les deux voiles de près (J1 et J2) qu'ils avaient amenées en voilerie pour réparation. Dans la foulée, comme la majorité de leurs petits camarades de la flotte des Class 40, ils ont repris le bricolage à bord, la priorité du jour ayant été la réparation du hublot, situé sur le pont, à l'avant de Qwanza, qui avait grandement souffert pendant la première étape : "Nous avons, aussi, réparé un des ballasts, celui de bâbord, il s'était fendu, précise Goulven. Le répartiteur de charge du moteur a également été remplacé. Demain, nous remettrons les voiles à poste." Ce vendredi soir, comme tous "les naufragés de la transat arrivés à Lorient", ils ont été invités par les organisateurs à un apéro. L'occasion de faire de nouvelles connaissances et bien entendu de parler de... bateau et de navigation !

04 Novembre 2023

Goulven et Nicolas sont désormais dans les starting-blocks ! Ce samedi 4 novembre, la direction de course leur a annoncé que le départ pour la deuxième étape de la Transat, qui les conduira à Fort-de-France, en Martinique, devrait être donné lundi, à 10h45. Ils s'élanceront alors pour un périple de 3 500 milles nautiques, avec obligation de laisser les Açores à tribord. Ce qui n'est pas vraiment du goût de l'ensemble des navigateurs qui voudraient, eux, plutôt laisser l'île de Madère, située plus au sud, sur tribord. Cela rendrait la course plus équitable, en termes d'options par rapport à la météo. En attendant de larguer les amarres, à bord de Qwanza, où les deux compères (qui ont reçu l'aide d'amis pour bricoler), on ne chôme pas. Ce samedi à bord c'était ambiance "atelier couture et voilerie" ! Goulven et Nicolas se sont affairés à changer l'émerillon de l'un de leur foc et surtout ont fait tout un travail d'épissures et de surgainage sur leurs drisses : "Le bateau est prêt", assure Goulven qui a hâte de retrouver le large. Ce dimanche, il restera que quelques broutilles à faire et ce sera parfait." Côté autres bonnes nouvelles, c'est la remontée de Qwanza au classement : certains équipages ayant été sanctionnés de pénalités, Qwanza est passé de la 38e à la 35e place ! Ce dimanche à 15h, tous les skippers ont rendez-vous pour un briefing général. PS : Sur les photos : Nico, dit "Marseille", Kim et Charline en plein travail.



05 Novembre 2023

Ce dimanche 5 novembre, le briefing de la direction de course qui a été donné à tous les skippers l'a confirmé : le départ de la deuxième étape (3 500 milles) de la Transat Jacques Vabre, qui mènera les Class 40 de Lorient à Fort-de-France, sera bien lancé, ce lundi 6 novembre. Comme ses petits camarades, Qwanza devra couper la ligne exactement à 10h45. Ce sera alors parti un nouvel épisode de navigation avec, en perspective, un début de course qui s'annonce encore assez musclé : "Dès le départ, nous devrions avoir 20 à 25 nœuds de vent et surtout, pas mal de mer, explique Goulven. Ensuite, à partir de mercredi, nous allons nous retrouver face à un anticyclone et il va falloir calculer de quel côté passer. Les routes sont très différentes. Chacun choisira en fonction de la vitesse de son bateau, suivant son allure par rapport au vent. C'est exactement ce que nous attendions car il va y avoir plusieurs options. Cela va donc devenir très intéressant d'un point de vue tactique." En attendant de lâcher les chevaux, ce dimanche, Goulven et Nicolas ont achevé la préparation de Qwanza avec, au menu, encore quelques épissures. Avitaillement fait, pleins assurés, moral au beau fixe et motivation extrême... Il n' y a plus qu'à ! Qwanza en a même des fourmis dans la quille ! PS : sur la photo le travail de matelotage à bord de Qwaza : un magnifique oeil épissé !

06 Novembre 2023

C'est donc reparti pour Qwanza. Ce lundi 6 novembre, à 10h45, par un temps particulièrement pluvieux et un vent d'ouest de 12 à 25 nœuds, le départ de la deuxième étape de la Transat Jacques Vabre a été donné aux 41 Class 40 encore en lice. Trois duos ont, en effet, dû jeter l'éponge à l'issue de la première étape entre Le Havre et Lorient. Elle fut particulièrement rude, beaucoup de bateaux ayant subi des avaries plus ou moins importantes. C'est la première fois que la Transat Jacques Vabre fait relâche de la sorte. Les organisateurs y ont été contraints afin d'épargner les concurrents de la tempête Ciaran qui a sévi en Bretagne et surtout en Normandie, où le vent a dépassé les 100 nœuds et où il a été enregistré des vagues de plus de 15 m. Bloqués donc depuis six jours dans le port breton, les Class 40 ont enfin pris la direction de Fort-de-France, en Martinique où, au terme de 3 750 milles (6 900 km), sera jugée l'arrivée de l'épreuve. Les navigateurs devront lutter, les prochaines 24 heures, avec une mer assez formée (4 à 5 m de creux), avant, d'ici environ 48 heures, de rencontrer du mauvais temps aux abords du cap Finistère, à la sortie du golfe de Gascogne. Avant ce nouveau départ, Goulven et Nicolas étaient pointés à la 35e place du classement général : "Nous avons envie, maintenant, de mettre un peu de sud dans notre route, souriait Goulven avec détermination. Nous sommes particulièrement motivés !" D'entrée de jeu, la ligne à peine coupée, les deux compères ont pris l'option de passer sous le vent de l'île de Groix (voir ci-dessous). La bataille est lancée ! Côté parcours, la direction de course a décidé de faire passer la flotte des Class 40 au nord de l'archipel de Madère. Ils devront laisser l'île de Porto Santo à tribord, puis se laisseront glisser dans les alizées à destination des Caraïbes.

07 Novembre 2023

Les dieux de la météo ne sont décidément pas cléments avec Qwanza ! Ce mardi matin, alors qu'ils progressaient dans une zone de mauvais temps, à la sortie du golfe de Gascogne, Goulven et Nicolas se sont retrouvés en panne d'électricité à bord : "Nous sommes passés sous un orage et depuis, nous avons des petits soucis électriques, expliquait Goulven brièvement dans un bref message audio. Nous sommes en train d'essayer de tout résoudre." Sans électricité, pas d'électronique. Par conséquent, plus de pilote automatique, plus de GPS, plus de cartographie, plus de quoi se positionner... Bref, il faut espérer que les deux compères puissent rapidement réparer. Ce qui devrait être le cas, Goulven, comme Nicolas, ayant largement les capacités et le savoir-faire pour réparer. Quoi qu'il en soit, ils gardent le moral et sont toujours au contact de la meute, le couteau entre les dents. A 12h50, Qwanza était pointé à la 36 place, à une centaine de milles du groupe des leaders et dans un mouchoir de poche avec le gros de la flotte.

08 Novembre 2023

Lors des dernières 24 heures, Goulven et Nicolas n'ont pas beaucoup dormi. Leur pilote automatique étant tombé en panne, ils ont été contraints de se relayer, sans cesse, à la barre de Qwanza. Le tout dans des conditions peu fameuses avec du vent fort, une mer formée et un froid piquant... Ce mercredi 8 novembre au matin, après une nuit particulièrement éprouvante, afin de remettre en état leur pilote automatique, ils ont décidé de faire halte dans le port de la Corogne, en Espagne. Finalement, après de longues heures à jouer les apprentis électroniciens, ils ont réussi à faire fonctionner partiellement leur pilote. De quoi retrouver le moral et surtout de faire route, à nouveau, vers la Martinique ! Désormais dans la queue du peloton de la flotte des Class 40, Goulven et Nicolas bataillent ferme pour rattraper les heures perdues à solutionner leurs problèmes d'électronique. En sachant que quatre autres équipages ont dû faire relâche dans un port pour réparer des avaries. Ce mercredi 8 novembre, en milieu d'après-midi, ils pointaient à la 38e place du classement.

09 Novembre 2023

À bord de Quanza, Goulven et Nicolas luttent pour garder le moral. La panne de leur pilote automatique les a grandement retardés par rapport au reste de la flotte. Au plus gros de leurs soucis d'électronique, en pleine nuit, ils étaient carrément incapables de s'orienter et ont perdu énormément de temps : "Nous tournions même en rond, regrette Goulven. Nous ne savions même pas où nous étions. Nous avons même été obligés de nous mettre à la cape afin de stopper le bateau". Lorsqu'ils ont pu réparer partiellement (leur girouette ne fonctionne plus et leur pilote ne marche qu'en mode compas), c'est la météo qui leur a joué des tours. Alors que les bateaux de devant avaient un vent favorable pour passer le cap Finistère, l'équipage de Qwanza s'est retrouvé face au vent et depuis de longues heures, tire des bords : "Le pilote est vraiment tombé en panne au plus mauvais moment, expliquait Goulven, dépité, à la mi-journée, ce jeudi 11 novembre. Maintenant, le bateau tape dans les vagues et nous plantons des pieux comme jamais cela ne m'est jamais arrivé. Le pire c'est que lorsque nous voyons un cap, nous pensons que c'est le dernier et non, il y en a encore un derrière." Des conditions peu fameuses qui mettent à rude épreuve les organismes et le moral des troupes: "Nous sommes sous J2 avec 2 ris dans la grand-voile, relève le navigateur. La nuit dernière, je n'ai pas dormi... On a eu jusqu'à 25 nœuds de vent. C'est sans fin quand on navigue dans ces conditions." Dans quelques heures, Quanza devrait enfin déborder le cap Finistère et se retrouver enfin avec un vent plus portant qui devrait lui permettre de reprendre une allure plus rapide. Les jeux sont loin d'être faits.

10 Novembre 2023

Après une longue lutte et d'interminables heures à tirer des bords, Qwanza a enfin passé le cap Finistère. De quoi désormais filer directement vers Madère avant, ensuite de se laisser porter par les alizés en direction de la Martinique. La nuit du jeudi 9 novembre au vendredi 10 novembre a été tout cas été un peu plus reposante pour Goulven et Nicolas qui ont repris du poil de la bête : "Nico m'a laissé dormir en fin de nuit, expliquait, en riant, Goulven à la mi-journée, visiblement reposé. Nous avons, enfin, passé le cap Finistère." D'après les routages qu'ils ont établis, les deux compères qui naviguaient au près devraient mettre quatre jours pour atteindre Madère : "Nous allons reprendre un peu de temps sur la flotte, explique Goulven. Le problème demeure la girouette. Dès qu'il pleut, elle ne fonctionne plus et nous n'avons plus aucune données." Goulven et Nicolas qui ont tenté de rechercher le problème en jouant encore les électroniciens pensent qu'un fil doit être dénudé en tête de mât. Une réparation peut donc être envisageable. Mais pour ce faire, il faut grimper en tête de mât. Ce ne sera pas dans l'immédiat. Avec l'état de la mer qui bouge pas mal, ce serait trop risqué. En fin d'après-midi, Qwanza filait à plus de 8 noeuds.

11 Novembre 2023

Quinze nœuds de vent, une mer peu agitée, une vitesse de 9 nœuds au prés et surtout un grand soleil. Il n'en fallait pas plus pour qu'à bord de Qwanza, ce samedi 11 novembre, Goulven et Nicolas retrouvent le sourire et affichent un moral au beau fixe : " Avec ce soleil, on revit, ne cache pas Goulven en bon sudiste. Cela change du front chaud que nous avons rencontré, la veille, avec 25-30 noeuds de vent de face et des vagues de 5 m." A la mi-journée, Qwanza filait sous grand voile haute et J2, à 80 milles des bateaux qui les précèdent. Ils comblent, peu à peu, leur retard, mais ne chôment pas pour autant. Ce samedi matin, à bord, c'était atelier couture : "Une des lattes de la grand-voile avait percé son gousset, explique Goulven. Heureusement que nous ne l'avons pas perdue. Nous avons pu recoudre." Fichiers météos à l'appui, la question du jour, pour l'équipage, est de savoir comment ils vont négocier l'anticyclone qu'ils vont croiser. Car à bord de Qwanza, on n'arrête pas, non plus, de faire travailler ses méninges.

12 Novembre 2023

Qwanza a passé la vitesse supérieure. Changements de voiles, réglages permanents, analyse des fichiers météo... Goulven et Nicolas s'activent, sans relâche, à faire avancer le bateau. Un coup d'œil au classement confirme que leur travail n'est pas vain. Ils avalent les milles avec un appétit sans limite et reviennent sur les bateaux qui les précèdent. Au pointage de la mi-journée, Qwanza ne comptait que 30 milles de retard sur Le bleuet de France et 40 milles sur Mussulo 40.

De quoi se faire plaisir : "La nuit a été paisible et depuis ce matin, nous nous activons à faire avancer le bateau au maximum, confirmait Goulven ce dimanche matin. Comme l'on dit dans le jargon, "on torche de la toile". Un coup nous envoyons le spi, le J1, le code zéro... Nous n'arrêtons pas !" Le souci du jour est de négocier au mieux l'anticyclone qui leur barre la route. A la mi-journée, comme la grande majorité de leurs petits camarades, ils bataillaient ferme pour ne pas se faire "engluer" dans la pétole, ce satané manque de vent qui donne des angoisses à tous les marins.

Et lorsque Qwanza le leur permet, entre deux virements de bord, les deux navigateurs s'adonnent à la lecture ou se détendent. Avec toujours le moral au beau fixe !

 
13 Novembre 2023

A bord de Qwanza, la bataille fait rage. Goulven et Nicolas sont plus que jamais sur le pied de guerre. Réglages, changements des voiles, étude constante des fichiers météos, mise en place de routages virtuels... Les deux navigateurs n'ont pas une minute à eux. Ils se démènent corps et âme pour faire avancer Qwanza le plus rapidement possible. Avec parfois de mauvaises surprises. S'ils avaient regagné du terrain sur le reste des concurrents, Goulven et Nicolas déchantaient, ce lundi 13 novembre, en milieu de matinée. Car la météo leur a joué des tours : "Nous avions bien négocié l’anticyclone qui nous barrait la route mais pendant la nuit, il est redescendu sur nous, expliquait, déçu, Goulven, ce lundi 13 novembre. Nous avons perdu 60 milles (110 km) en quelques heures."

Un peu plus tard, le duo retrouvait le sourire : "Nous sommes sous spi et cela commence à débouler !" se réjouissait Goulven dans l'après-midi. Côté bonne nouvelles, les deux marins étaient heureux d'avoir réparé leur matelas gonflable: "Nous nous sommes aperçus que c'est pas mal, non plus, de dormir allongé plutôt que roulés en boule !" se marrait aussi Goulven. En plus, nous n'avions plus de musique sur les téléphones mais grâce à la tablette, nous en avons à nouveau. Ce matin, c'était ambiance discothèque dans le bateau."

La Martinique est encore loin. Qwanza est à plus de 2 900 milles nautiques (5370 km) de l’arrivée. Il y a largement le temps de recoller au gros du peloton. Pas encore bien fort, l'alizé devrait d'ailleurs être un peu plus nerveux dans les heures à venir : "Nous avançons à 8-9 nœuds, expliquait Goulven, ce lundi soir. Nous devrions revenir, un peu, sur ceux de devant en début de nuit."

A terre, on croise les doigts.

La vacation radio du jour (Goulven en direct) sur le site de la transat : https://www.

transatjacquesvabre.org/

images-sons 


14 Novembre 2023

C’est le véritable casse-tête permanent à bord de Qwanza. Goulven et Nicolas doivent composer avec une météo plus que capricieuse. Le régime des alizés est particulièrement instable et faible. Il ne dépasse pas les 10 nœuds et oblige les navigateurs à tricoter, sans cesse, sur l’eau, à la recherche du moindre souffle d’Eole. Ce qui est loin d’être évident : « Nous avons encore eu une fin de nuit sans vent, regrettait Goulven en faisant le point, ce mardi 14 novembre, sur les dernières 24 heures de course. Nous avons même affalé le spi qui ne servait plus à rien. Nous avons des conditions méditerranéennes avec du soleil, un vent faible et une mer plate. Il y a quand même parfois un train de houle qui nous rappelle toutefois que nous n’aurons pas de la fougasse au menu du soir ! »

Côté bonnes nouvelles, Nicolas a grimpé en haut du mât et a réparé la girouette. Par conséquent, tout refonctionne, à nouveau, en termes d’électronique à bord de Qwanza où on garde le moral et, bien entendu, le sens de l’humour. C'est l'essentiel.


15 Novembre 2023

À bord de Qwanza, qui ferraille toujours avec les conditions météos, pour revenir sur les bateaux de devant, dans la série des casse-têtes, au quotidien, il y a aussi la gestion de l’énergie. Le bateau est équipé de seulement deux batteries. Ce sont elles qui distribuent l’électricité à tous les appareils électroniques : centrale de navigation, pilote automatique, AIS, lumières, antenne satellite (sur la photo, l’espace de gros champignon, à l’arrière), ordinateur… Des engins particulièrement énergivores.
Régulièrement, donc, il faut veiller à avoir des batteries bien chargées. Pour se faire, Goulven et Nicolas disposent de plusieurs éléments.
En premier lieu, ils ont le moteur sur lequel est branché un chargeur. C’est un moyen très efficace afin de refaire le plein d’électricité. Mais pour fonctionner, il a besoin de gasoil et justement, à bord de Qwanza comme tous les autres Class 40, les navigateurs ont embarqué une quantité de carburant limitée.
Il y a aussi un hydrogénérateur. Fixé à l’arrière du bateau, comme une sorte d’éolienne sous-marine, il produit du courant avec la force de l’eau lorsque le bateau avance. Mais il faut, pour cela, avoir une allure assez vive.
Il y a enfin les panneaux solaires. Il y en a deux sur le pont de Qwanza. Ils sont parfaits lorsque Râ est en forme. Mais produisent beaucoup moins lorsque le temps est gris. 

Or, justement, lors des premiers jours de course, la météo n’était pas fameuse : « Pendant la première semaine, nous nous sommes un peu emballés sur le régime moteur, ne cache pas Goulven qui a vu le niveau de gasoil grandement baisser. Nous avons entamé les réserves de carburant. Heureusement, donc, que nous avons l’hydro et les panneaux. En fait, l’antenne satellite consomme beaucoup. Nous ne la mettons en fonction que lorsque les batteries sont à pleine charge. En mode compas, le pilote automatique a aussi beaucoup consommé. »
À bord de Qwanza, pour faire avancer le bateau, Goulven et Nicolas ne gèrent pas que l’énergie du vent.

16 Novembre 2023

Malgré l'immensité de l'océan Atlantique, il n'est pas rare de faire des rencontres avec d'autres bateaux. C'est ce qui est arrivé à Qwanza, mercredi 15 novembre, en soirée : "Nous avons croisé un catamaran de croisière, explique Goulven. Nous avons discuté avec son équipage à la VHF, la radio du bord. Il est parti de Toulon et traverse l'Atlantique en direction des îles Grenadines, aux Caraïbes. Nous en avons profité pour partager nos fichiers météos à jour. Les équipiers nous ont raconté avoir aussi rencontré un Suisse qui était en train, comme eux, de traverser l'Atlantique. Ils l'ont fait monter à bord pour boire une bière !" Une belle rencontre, oubliée quelques heures plus tard... Car ce jeudi en milieu de nuit, c'est le spi qui a décidé de jouer des siennes : "Ce n'est plus une course mais un parcours initiatique, raconte avec philosophie Goulven. Nous avons démêlé un coquetier dans le spi que nul n'aurait pu imaginer ! En fait, le spi s'est dégonflé sur un surf et il s'est enroulé, très bas, en faisant une grande poche au-dessus. J'ai été obligé de monter dans le mât. J'y suis resté deux heures pour essayer de le démêler. Finalement, j'ai coupé la sangle située en haut de sa têtière." Ensuite, c'est la chaussette qui sert à hisser et à affaler le spi qui a refilé des angoisses aux deux navigateurs : "Il y avait aussi des nœuds, râle Goulven. Il a fallu passer, à nouveau, deux heures dans le mât pour tout défaire.

Heureusement, il n'y avait que 10 à 15 nœuds de vent." Une fois tout rentré dans l'ordre, Goulven et Nicolas ont hissé un nouveau spi (le A5) et repris leur route en direction des Canaries et de l'île de La Palma, où ils envisagent de faire escale à Santa Cruz de la Palma afin de refaire le plein de gasoil : "Si la course doit s'éterniser, autant avoir des réserve, explique Goulven. Nous ne nous arrêterons si possible que le temps de faire le plein."


17 Novembre 2023

Il n'y aura donc pas eu de halte-stop pour Qwanza. Après réflexion et estimant que le bateau avance bien, Goulven et Nicolas ont décidé de ne pas s'arrêter à l'île de La Palma, aux Canaries. Ce qu'ils avaient envisagé, dans un premier temps, afin de refaire le plein de gasoil : "Nous avançons avec notre spi A2 et il n'est pas mal du tout, explique Goulven. Il est plus stable. Je dirai même qu'il est magique. La nuit dernière, nous avons slalomé entre les îles pour chercher du vent. J'en ai profité pour faire tourner plein de routages sur l'ordinateur. Pour ce qui est du gasoil, nous ferons avec ce que nous avons" Toujours sous spi, au petit matin, ce vendredi 17 novembre, Qwanza filait dans 20 nœuds de vent, s'offrant des pointes à 17 nœuds.

De quoi revenir sur le groupe de devant, avant de perdre à nouveau du terrain : "Cela nous agace pas mal de ne pas nous être rapprochés plus que cela, alors que nous avons travaillé toute la nuit, sans cesse, pour faire avancer le bateau, regrette Goulven. J'espère vraiment que la météo va changer et évoluer en notre faveur." En fait, chaque fois qu'ils rattrapent une partie de leur retard, les deux navigateurs, qui continuent à descendre vers les îles du Cap Vert, se retrouvent, à nouveau, dans du vent faible, alors que ceux de devant accélèrent...
Un vrai casse-tête permanent à résoudre à bord de Qwanza où Goulven et Nicolas ne relâchent toutefois pas leurs efforts. Sur les photos : sur l'écran de l'ordinateur du bord les zones sans vent au passage des îles Canaries et les deux navigateurs s'attachant à faire avancer Qwanza.

18 Novembre 2023

Qwanza revient fort ! Depuis plusieurs heures, profitant des faveurs d'Eole et les exploitants judicieusement, Goulven et Nicolas s'offrent un retour en force sur les bateaux qui les précèdent. En début de soirée, par rapport à la distance de chacun jusqu'à l'arrivée, ils n'étaient plus qu'à une trentaine de milles de Mussulo 40, le 36e. En sachant que ces dernières vingt-quatre heures, ils ont enclenché le turbo, parcourant 225 milles : "Lundi, nous n'aurons plus beaucoup de vent, expliquait Goulven ce samedi 18 novembre au matin. Mais en attendant, nous avons deux jours pour nous faire plaisir dans les alizés. C'est le pied ! C'est exactement ce que je suis venu chercher dans cette transat : un grand soleil, une houle qui s'allonge et le speedo qui oscille entre 11 et 16 nœuds. Nous réalisons vraiment que ces bateaux sont taillés pour naviguer sur l'océan." Cette navigation express leur offre aussi son lot de surprises. Alors qu'ils voient de moins en moins d'oiseaux, ce qui est normal puisqu'ils s'éloignent de la terre, en plus de voguer avec des dauphins, ils croisent la route de poissons volants. Ils ont même aperçu un gros insecte blanc mi-libellule, mi-criquet !

Sur les photos : le capitaine Goulven au sortir de sa prise de quart et Qwanza à fond, à la limite d'enfourner !

19 Novembre 2023
Naviguer en course demande un investissement de tous les instants. Depuis leur départ, Goulven et Nicolas n'ont pas vraiment le temps de chômer. Ils se démènent, sans compter, afin de faire avancer Qwanza au plus vite : réglages fréquents des voiles, étude permanente des fichiers météos et de la meilleure route à suivre, gestion de l'énergie du bord, remplissage et vidange des ballasts... Tout un travail qui ne les empêche pas de prendre un maximum de plaisir : "Cela va faire une semaine que nous sommes sous spi, se réjouit Goulven. La nuit, le vent se calme un peu mais surtout, la mer s'aplatit. Nous gardons quasiment la même vitesse. La sensation de glisse est incroyable. La journée d'hier (samedi 18 novembre) a été la plus belle depuis que nous sommes partis. C'était une navigation juste parfaite. Aujourd'hui, dimanche, nous avons eu des conditions méditerranéennes avec un vent plus léger."

Un pur bonheur qui n'empêche pas Goulven de faire travailler ses méninges afin de se projeter sur l'arrivée : "Je fais tourner régulièrement des routages pour essayer de voir quand les autres et nous-mêmes arriverons, explique-t-il. Mais cela varie sans cesse. Quoi qu'il en soit, je peux confirmer, aujourd'hui, que la panne du pilote automatique nous a coûté très cher... La prochaine transat, je veillerai à ce que tout soit doublé à bord, la girouette, les vérins du pilote, les différents calculateurs... Même si cela signifie qu'il faudra trouver une solution de production d'énergie indépendante."

20 Novembre 2023
Un géni (e) s'est invité à bord de Qwanza, ce lundi 20 novembre. Ce matin, l'heure était, en effet, au nettoyage de printemps à l'aide de la fameuse lessive. Profitant de conditions idoines, le bateau faisant route tranquillement et sans rechigner sous pilote automatique et toujours sous spi, Goulven et Nicolas en ont profité pour faire une grande lessive. Bien entendu, dans la foulée, ce fut étendange du linge sur les filières : "manouche un jour, manouche toujours !" Côté navigation, Qwanza poursuit sa route en direction de la Martinique et avale les milles avec un appétit féroce : "Nous sommes descendus en dessous de la barre des 2 000 milles nautiques jusqu'à l'arrivée, explique Goulven. Nous parcourons 210 à 220 milles (400 km) par jour. Cette nuit, nous devrions changer un peu de direction afin de prendre la direction du trou de souris que nous visons depuis quatre jours. Nous avons descendu la grand voile et le spi d'environ 5 cm afin que leur drisse (la corde qui sert à hisser et à affaler la voile) ne s'use pas à force de raguer au même endroit". Qwanza devrait arriver à Fort-de-France d'ici une dizaine de jours. En sachant que les dés sont loin d'être jetés. Les bateaux ayant fait une route nord devraient, en effet, ralentir dans les heures à venir. Cela pourrait faire le jeu de Qwanza... On croise les doigts !

Sur les photos : étendage à bord de Qwanza et le capitaine en discussion avec le géni (e)



21 Novembre 2023

Quand Éole s’essouffle, les marins disent qu’il y a "pétole". Et lorsque le vent est aux abonnés absents, on peut carrément parler de "pétole molle". De quoi taper sur les nerfs lorsqu’en course, les navigateurs s’évertuent à faire avancer le voilier. Depuis plusieurs heures, c’est le cas à bord de Qwanza, où Goulven et Nicolas s’escriment à faire glisser le bateau dans la… pétole : "Elle nous a rattrapés, regrettait Goulven au petit matin, ce mardi 21 novembre. Et bien entendu, ceux de devant sont un peu moins impactés que nous ! Nous avons bataillé toute la nuit pour essayer de dépasser les 3 nœuds". En fin de matinée, les deux marins avaient retrouvé un semblant de sourire : « Ceux de devant n’ont plus d’air, non plus, expliquait Goulven à la mi-journée. Normalement devrait arriver de derrière… Nous avons hâte de retrouver les alizés. Parce qu’en plus de la pétole, il fait gris..» En sachant que la situation va encore durer au moins 24 heures. Sur la photo, drisses et écoutes au petit matin montrant que les deux navigateurs n’ont vraiment pas chômé pour faire avancer Qwanza.

Sur la photo, drisses et écoutes au petit matin montrant que les deux navigateurs n’ont vraiment pas chômé pour faire avancer Qwanza.

 
22  Novembre 2023

Une voix posée et calme, un brin de bonne humeur et une envie incroyable de faire avancer Qwanza au maximum de son potentiel : ce mercredi 22 novembre, la pétole de la veille oubliée, Goulven affichait un moral d’acier. Avec Nicolas, ils ont repris leur marche en avant et surtout, ils voient, à nouveau, diminuer leur retard sur les bateaux qui les précèdent : "Nous avons 13 à 14 nœuds de vent, se réjouissait Goulven, vers 13 h. Nous avançons à plus de 10 nœuds. C’est parfait. Nous avons fait un routage virtuel sur l’ordinateur et nous essayons d’être en avance sur lui. Nous devrions arriver en Martinique d'ici dix jours."  Il semble que les options prises par certains concurrents, notamment ceux qui ont emprunté une route nord, soient moins avantageuses que celles de ceux qui ont choisi un cap plus au sud. C’est le cas de Qwanza : "Je pense que nous sommes mieux situés qu’eux, analyse Goulven. D’autant que le vent va arriver de derrière et donc, nous le toucherons avant eux. Nous avançons à un angle de 145° de la direction du vent, sans aller plus au sud. Nous n’avons jamais lâché. Nous ne pouvons vraiment pas faire mieux. En sachant que devant, tout le monde se bat aussi, de jour comme de nuit. Quoi qu’il en soit, le bateau est nickel et avance comme il faut." Le matin, Goulven et Nicolas ont renvoyé leur plus grand spi après l’avoir réparé en tête. De quoi passer la vitesse supérieure sous un grand soleil. Il n’ y a plus qu’à croiser les doigts.

Sur les photos : le plus grand spi sous un franc soleil !



23 Novembre 2023

À bord de Qwanza, nul ne lâche le morceau et cela va certainement finir par payer. En tout cas, Goulven et Nicolas se démènent pour revenir sur les concurrents qui les précèdent. Dans les jours à venir, s’ils maintiennent leur allure et surtout, si les prévisions météos se confirment, ils pourraient passer devant les équipages ayant pris une option nord. À terre, certains vont attraper des ampoules à force de croiser les doigts… Bref, sur Qwanza, on navigue le couteau entre les dents, on règle les voiles en permanence et surtout, on cogite dur : « La nuit de mercredi à jeudi, a été parfaite, raconte Goulven. C’était quasiment la pleine lune et nous y voyions comme en plein jour. Nous n’avons même pas eu besoin d’allumer nos lampes frontales ! Nous avons fait un empannage pour nous recaler et avons changé le spi par un plus petit, le A2 afin d’être plus adaptés aux conditions de navigation… » À la mi-journée, Qwanza filait à 15-18 nœuds sous un franc soleil, très bon pour le moral des troupes : « Nous sommes dans l’ambiance des alizés, savoure Goulven. La houle s’allonge et le bateau commence à prendre de très bons surfs. Au dernier routage, l‘arrivée était prévue dans huit jours, mais nous espérons arriver plus tôt, peut-être dans sept jours. En fait, nous faisons la course avec le routage de l’ordinateur. Nous l’avons réglé sur 100 % de marche du bateau et nous essayons d’être devant les projections. » D’après les prévisions météos, Qwanza devrait conserver du vent dans les heures à venir. Une très bonne nouvelle.

24 Novembre 2023

Une nuit idoine avec un bateau qui avance à une moyenne de 10 nœuds, un lever de soleil magnifique, un nouveau changement de spi, un autre empannage et la rencontre avec… Polyphème, le cyclope.

La journée du vendredi 24 novembre a commencé sous les meilleures auspices à bord de Qwanza. Goulven et Nicolas avalent les milles avec délectation et affichent un moral d’acier : "Nous avons passé une super nuit, se réjouit Goulven. Pour une fois, les conditions nous étaient favorables. Le fait d’empanner, au petit matin, va devenir une tradition ! En tout cas, c’est sympa ces recalages par rapport au vent, cela dynamise la journée" Qwanza est désormais à moins de 1500 milles de l’arrivée en Martinique.

D’après les routages calculés sur l’ordinateur du bord, Qwanza, pourrait couper la ligne d’ici le 1er novembre. D’ici là, et cela se confirme pour l’heure, Goulven et Nicolas pourraient rattraper leur retard sur les bateaux qui les précèdent. D'autant que la météo paraît leur être favorable.

25 Novembre 2023

Depuis environ 24 heures, à bord de Qwanza, Goulven et Nicolas gèrent un nouveau paramètre : les sargasses. Il s’agit d’algues brunes qui se développent et vivent à la surface de l‘eau. Jusque-là, rien à redire. Sauf que, portées par le courant, elles forment de grandes nappes à la surface de l’eau et croisent la route des navires. Qwanza n’y a donc pas réchappé : "Elles forment des espèces de traînées, explique Goulven. Lorsque l’on y passe dessus, certaines viennent se coincer entre la coque et le haut du safran. Nous avons essayé de les enlever mais c’est peine perdue. Dès que nous les enlevons, nous traversons un nouveau banc ! En fait, elles finissent par se décoincer seules et disparaissent. »

Côté navigation, Qwanza file à environ 10 nœuds, au grand largue, dans l’alizé qui souffle à 15 nœuds. Ayant trouvé sur l’ordinateur la notice du pilote automatique, Goulven et Nicolas ont aussi peaufiné les réglages de la bête. Il est devenu plus efficace et la marche de Qwanza s’en ressent : "On dirait que le bateau est une lame, assure Goulven. Il ne bouge pas !"

Au classement, s’ils continuent sur la même lancée, Goulven et Nicolas devraient passer devant le bateau de l’équipage martiniquais qui avait pris une route nord. En revanche, ils peinent à revenir sur ceux qui sont juste devant et font la même route qu’eux . Qwanza devrait couper la ligne d’ici vendredi prochain. D’ici là, son classement devrait évoluer.

26 Novembre 2023

A bord de Qwanza, depuis le départ de Lorient, au-delà de la navigation, toute une organisation de vie au quotidien s’est instaurée. En sachant que les nuits sont longues sous les tropiques. Il fait nuit dès 19h et le soleil ne reprend ses droits que vers 9 h : "Sauf impératif de manœuvre et encore, puisque nous arrivons à tout faire en solo, nous coupons la nuit en quatre, explique Goulven. Nous avons établi un premier quart jusqu’à 2h30, un deuxième jusqu’à 5h30 et deux plus courts pour finir la nuit. Cela nous convient. Cela permet de bien récupérer avec, en plus, une sieste, l'après-midi."

Reste qu’il faut aussi songer à se restaurer. Là aussi, à bord de Qwanza, une routine s’est mise en place : "Comme nous avons pioché sur les réserves des "petits déj", lors du passage des fronts du début de course, le matin, désormais, c’est juste des cafés et une barre de céréales. À midi et le soir, c’est ambiance "manger penché" (traduction Qwanzalienne: un sachet de nourriture lyophilisée demeure le meilleur plat même lorsque le bateau gite), dont nous ne nous lassons pas à condition de varier les marques…" L’après-midi, vers 16h, pour goûter, c’est compote : "Ce n’est pas beaucoup, mais en même temps, cela évite de faire du gras, se marre Goulven. Nico est un gros mangeur, il reste un peu sur sa faim mais nous allons tenir le coup car nous pensons au poulet boucané qui nous attend. » Côté provision, Goulven, ne cache pas qu’il leur manque "du sucre, du poivre, de l’huile…"

Ce dimanche 26 novembre, au soir, Qwanza poursuivait sa route directe en direction de la Martinique avec quelques surprises : "L’alizé est constant dans ses… irrégularités, confie Goulven. Samedi soir, à un moment donné, nous avons même eu un vent plein nord et nous pensions même que le pilote avait décroché." Idem au niveau de la force et de la direction d'Eole : "Un coup nous avons 10 nœuds, puis 20 nœuds, cela vient du nord-est, puis de l’est.. L’alizé n’est pas vraiment établi." A se demander si finalement, le tram ce n’est pas mieux à bord de Qwanza qui vient de rallier la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO)…