Carnet de randonnée - 4 mois de traversée des Alpes en autonomie

Écrit par : Les Transalpins

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Temps de lecture 16 min

Au printemps 2024, trois étudiants ont rejoint la Lagoped Family avant de s'élancer dans un voyage qui marquera leurs années universitaires et leur vie : la traversée des Alpes, sur les pas des loups. Récit de leur aventure, d'une durée de quatre mois. 

Epilogue

14 mars 2024, 1 mois avant le départ

Nous nous retrouvons tous les trois, Jules, Joé et Joseph, à Marseille. Cela fait maintenant un peu plus d’un an que nous travaillons sur ce projet de traversée et la phase de préparation arrive à son terme. Sommes-nous prêts ?


Pas le moins du monde. Et c’est pour cela que nous nous retrouvons ici à Marseille afin de dédier le prochain mois aux dernières préparations. Au programme : acheter tout notre matériel audio-visuel pour réaliser notre documentaire, nous équiper du matériel nécessaire pour quatre mois de randonnée et de bivouac, contacter tous les acteurs que nous interviewerons au fil du périple, et puis enfin se mettre en condition physique pour la traversée. (Spoiler : on n'a pratiquement pas fait de sport pendant ce mois-ci) En somme toute, il nous reste beaucoup de choses à faire.


Alors, on décide de s’isoler durant trois semaines à la montagne. On commence à rassembler le matériel audio-visuel, le matériel technique, les vêtements et à s’en servir.

Le départ approche, notre patience s’amenuise et l’envie de partir se fait de plus en plus sentir. Pourtant, les conditions météorologiques et d'enneigement ne sont pas favorables et nous obligent à repousser la date de départ. Nous ne partirons pas le 1ᵉʳ avril comme il était prévu, mais le 8. Alors comme la patience est mère de vertu, cela nous permet de nous équiper à la dernière minute de raquettes, de DVA, pelles, sondes et crampons, indispensables pour le début de la traversée. 

6 avril 2024 - 1 semaine avant le départ

Nous arrivons à Grasse, chez Joseph, le départ est fixé dans deux jours et on s’affaire à tout rassembler, vérifier une dernière fois que nous avons tout et surtout scruter inlassablement les BRA (Bulletin Risque d’Avalanche) du Mercantour et des Hautes Alpes sur Météo France. Il reste encore plus de 2 mètres de neige au-dessus de 2000m dans le Mercantour et cela monte parfois à 5 dans certains massifs. Le temps est à l’indécision et la date de départ recule encore. On partira le 13 avril, c’est décidé. Heureusement, ce ne sera pas un vendredi et la chance sera de notre côté pendant la traversée.


Nous profitons alors des derniers jours pour bien dormir, acheter nos premières provisions et faire enfin nos affaires. Dans le sac des Transalpins, il y a :

  • Nos vêtements Lagoped pour 4 mois de traversée (Veste, Doudoune, polaire, pantalon, legging, short, t-shirt, bonnet…)

  • Notre matériel de bivouac (Tente, tapis de sol, sac de couchage, popotte)

  • Notre matériel audiovisuel (Appareil photo et 2 objectifs, Drone, batteries portables et autres batteries, câbles et disques durs)

  • Notre nourriture (pour 3-4 jours d’autonomie en moyenne, l’intervalle entre deux points d’approvisionnement) et notre eau

  • Divers (Frontale, trousse à pharmacie…) 

Premier chapitre - Les Alpes Françaises, un engouement naïf

13 avril 2024 - Jour J

Nice, 12h, le soleil tape sur la côte d’azur, l’ISO 0°C est à 4100m, on dirait bien que c’est enfin le moment de partir. Destination : Ljubljana. On devrait arriver courant août si tout se passe bien. Tout au long de cette traversée, nous allons à la rencontre des acteurs concernés par le loup afin de les interviewer et réaliser un documentaire qui retrace notre expérience, à pied, sur le chemin de la compréhension de la problématique du retour du loup dans les Alpes.


Nous sommes donc partis insouciants, presque dans le déni, le 13 avril sous 30°C et le soleil au zénith. Au bout des 18 km de notre première étape, Jules n’était même plus capable de se plaindre, le sac broyant nos épaules et nos hanches. Joseph regretta alors pour la première et dernière fois la gravité terrestre. Séchés de cette journée, on s’est quand même demandé si ça n’était pas trop gros comme projet avant de s’endormir avec le moral dans les chaussettes de Joé, en décidant de continuer pour voir jusqu’où l’on pouvait aller.

Transalpins, Traversée des Alpes
L'un de nos campements avant d'arriver dans la neige.
Transalpins, Traversée des Alpes

Du 13 au 24 avril, mise en jambe dans le Mercantour

Les premiers jours ont été intenses. Avec une moyenne de 18km par jour et 21 kg sur le dos, nos corps ont été forcés de s’adapter à ce quotidien qui allait durer encore plus de 100 jours. Entre journées ensoleillées, premières neiges et premiers acteurs interviewés, le début annonçait une belle couleur à ce périple. Et bien sûr le Mercantour et ses paysages sauvages nous ont offerts de belles surprises : chamois, cerfs, gypaètes et même un loup, le seul qu’on ait vu sur les quatre mois.

Transalpins, Traversée des Alpes
À Roure, le plus beau village du Mercantour

Du 25 avril au 7 mai, changement d’ambiance

À peine quittés le Mercantour, les conditions météo se gâtent de jour en jour et nous contraignent le 27 avril à rebrousser chemin au pied du Col du Girardin, en proie à une purée de pois qui ne laisse apparaître pas le moindre repère. Obligés de contourner par Guillestre, le Queyras fut de courte durée et mit à l’épreuve notre confort et notre détermination. Quelques jours plus tard, le massif du Thabor lui ne nous laissa aucun répit. Deux jours de pluie non-stop nous accompagnent jusqu’au fond de la Vallée Étroite, passage obligatoire pour rejoindre la vallée de la Maurienne. 

Transalpins, Traversée des Alpes
Col de Girardin : Joseph installe le trépied pour filmer notre discussion. On fait demi-tour ou non ?!!
Transalpins, Traversée des Alpes
Définitivement, il y avait trop de neige…

Du 8 au 19 mai, la routine

La Savoie nous sourit à notre arrivée, trois jours de grand soleil et des rencontres imprévues, parfois chaleureuses, mais toujours passionnantes. Après la vallée de la Maurienne, nous basculons sur la vallée de la Tarentaise et ses stations de ski qui ferment tout juste. La montagne est vide, les refuges d’hiver encore ouverts nous sauvent quelques fois d’intempéries, mais pas tout le temps. 16 mai, 9h, il neige à gros flocons et une grosse journée nous attend. Et alors que la neige se transforme en pluie, l’espoir de trouver le refuge du plan de la Lai ouvert disparaît. Il est 16h, on est trempés et démoralisés. C’est alors que des agents du service routier arrivent pour faire des installations. On discute avec eux et nous proposent de nous redescendre à Beaufort, la nuit s’annonce gâtée. Alors, on accepte et nous voilà à Beaufort, un toit et une douche à la clé, une chance qu’on chérit et qui nous requinque pour la suite. 


On arrive alors le 18 mai à Chamonix pour une semaine de pause, mais pas de tout repos : quatre interviews, une journée de chantier d’alpage, une journée terrain pour relever des pièges photographiques et un détour à Lausanne pour voir des amis le temps d’une journée. Cette coupure fait du bien avant de quitter la France. 

Transalpins, Traversée des Alpes
Joseph, très heureux que le refuge soit ouvert.
Transalpins, Traversée des Alpes

Deuxième chapitre - Les Alpes Suisses, la difficulté mentale

Du 26 mai au 13 juin, de déceptions en déceptions

Nous repartons de Chamonix le 26 mai, reposés et motivés, nous avons le lendemain rendez-vous avec OPPAL (une asso qui met des bénévoles à disposition des éleveurs pour effaroucher le loup la nuit) sur les hauteurs de Martigny pour faire une veille de nuit sur un alpage. Une arrivée en Suisse qui commence un peu trop bien… Nous nous étions fait la réflexion en France, mais la Suisse nous le confirme, les paysages alpins sont très anthropisés, surtout ici dans la vallée du Rhône. Alors, on monte, on monte jusqu’à la surplomber. Mais c’était sans compter la météo capricieuse qui nous fait enfin comprendre que nous étions partis la mauvaise année. On accepte notre destin et nous redescendons à Sion pour continuer pendant deux semaines en fond de vallée à longer le Rhône, bien loin des sommets blanchis récemment. Les Transalpins prennent alors un grand coup au moral. Maladie et vomissement à la chaîne, paysages (ultra)urbanisés et le budget alimentaire qui explose. Malgré quelques acteurs qui ponctuent notre quotidien de marche et nous apportent une nouvelle vision sur la problématique du loup, le moral est à basse altitude. 

Transalpins, Traversée des Alpes
Après une nuit de veille avec OPPAL, le lever de soleil était magnifique.
Transalpins, Traversée des Alpes
Malgré une vallée du rhône très urbanisée, on a pu capturer des paysages peu communs.
Transalpins, Traversée des Alpes
Et on a croisé Shaun le mouton.

Du 14 au 25 juin, le Tessin salvateur

Si vous êtes déjà allés en Suisse, vous saurez sûrement qu’on voit beaucoup les montagnes. Néanmoins, le canton du Tessin dégage une ambiance particulière, une ambiance sauvage, dotée d’une végétation assez atypique et d’un relief abrupt. Généralement, les vallées se situent entre 300 et 800m d’altitude tandis que les cols montent à 2000, 2100, voire 2500m et plus. Mais malgré des journées très physiques, le canton du Tessin nous a offert des moments incroyables, à base de parlé italien, de refuges non gardés plus luxueux que nos maisons et de repas gourmands. Avec ça on a pu oublier les moments de grêle et d’averses interminables…

Transalpins, Traversée des Alpes
À faible altitude, nous pouvions enfin marcher sur du dur, un vrai plaisir.

Du 26 juin au 3 juillet, la Suisse comme on se l’imagine

Des grands alpages, des petits chalets, des vallées urbanisées et riches, et puis des touristes, beaucoup de touristes. Si vous souhaitez savoir où trouver ça, allez dans le canton des Grisons. Après avoir traversé la deuxième langue italienne, nous découvrons la Haute Engadine, région de Saint Moritz. Et alors que le temps est au beau fixe, des paysages époustouflants, nous cassons un objectif de l’appareil, qui plus est celui permettant de zoomer. Pas le temps de réfléchir, nous rebondissons et en commandons un nouveau. Pendant ce temps, on avance et on utilise l’autre qui nous donne de belles surprises. Parfait pour capturer le début de l’été et nos débuts en Italie ! 

Transalpins, Traversée des Alpes
Des paysages de carte postale en veux-tu en voilà. Si jamais vous allez en Suisse, passez par la vallée d’Avers.
Transalpins, Traversée des Alpes

Troisième chapitre - Les Alpes Italiennes, l’ambivalence

Du 4 juillet au 13 juillet, la joie, la peur, la colère

Quelle joie ! Nous arrivons enfin en Italie ! Après deux brefs avant-goûts, nous y sommes. Le soleil, les pizzas à 6€, et les cafés à 1€ (et pas à 4,5€)... Joé et Joseph profitent de notre bref passage à Bormio pour changer leurs chaussures, Joseph avait la semelle très abimée et Joé voulait plus de confort pour le gros mois qu’il nous restait. En effet, et ce, pour la première fois de la traversée, nous sentons enfin l’été et avec ça l’espoir d’un confort supplémentaire. Alors, on engage notre route vers le Parc National du Stelvio, dont les sommets culminent pour la plupart à plus de 3000m d’altitude.


Mais l’expérience en haute altitude a ses limites et le 6 juillet, alors que nous nous apprêtons à passer le col le plus haut de la traversée (3000m), nous enchaînons les erreurs : nous nous trompons d’abord de col par manque d’étude de la carte, puis nous pensons judicieux d’emprunter les crêtes pour rejoindre le bon col avant de se rendre compte que le sentier s’apparente plus à de l’alpinisme que de la randonnée. Il se met à pleuvoir, la peur nous prend et nous décidons de rebrousser chemin, mais en arrivant au point d’intersection entre le sentier du mauvais et du bon col, nous décidons tout de même d’essayer de passer le bon col. De la neige, de la roche friable, des pierres instables et une pente à 50%. Voilà de quoi est fait le sentier (si on peut appeler ça un sentier), et tout ça à 2900m d’altitude avec un temps qui se gâte de minute en minute. Arrivés en haut, il nous est impossible de basculer de l’autre côté. Alors pour de bon, nous abandonnons la fin de l’étape pour retourner au refuge Arnaldo Berni que l’on avait croisé le midi. Dans la descente, nous faisons très attention, d’autant plus que la fatigue se mélange aux émotions encore vives dans nos esprits. Joé ouvre la marche et Joseph suit de plusieurs dizaines de mètres. Jules reste en arrière et commence doucement à descendre quand un rocher de plusieurs centaines de kilos se détache sous ses pieds. Il roule un peu puis tombe dans la direction de Joseph. Jules a tout juste le temps de lui crier : “JOSEPH ! ROCHER !” pour qu’il se retourne et se décale in extremis. Le soir même, on installe nos tentes à côté du refuge, abritées par le minuscule toit de la chapelle jouxtant le refuge. Cette fois-ci, plus de doutes, on a atteint nos limites. La pire journée de la traversée aurait pu finir beaucoup plus mal. On débriefe pendant deux heures avant de s’endormir, résolus à ne plus prendre d’aussi gros risques.


Néanmoins, Joseph en fait les frais deux jours après et tombe malade à Cogolo, où on se pose un jour, avant de continuer direction Bolzano. Nous y arrivons le 13 juillet et fêtons l’anniversaire de Joé par la même occasion.

Transalpins, Traversée des Alpes
Jules, 1 minute avant sa tentative d’homicide involontaire

Du 14 au 25 juillet, ô Dolomites

Nous passons les 14, 15, 16 et 17 à Bolzano et les alentours pour réaliser plusieurs interviews avec les premiers acteurs italiens et une sortie terrain sur un alpage avec le centre de recherche EURAC Research. Emplis de nouvelles connaissances et de l’envie de retrouver les hauteurs, nous repartons de la capitale du Sud-Tyrol, porte des mythiques Dolomites. À l’est de Bolzano se trouve le parc naturel Sciliar-Catinaccio, et nous comprenons vite pourquoi. Une roche blanche, des falaises abruptes et des refuges nichés au cœur de ses paysages lunaires. C’est aussi la dernière fois que nous marchons sur la neige et que nous sommes seuls. La beauté des Dolomites se mérite, on l’a bien compris, mais je ne crois pas que ça soit le cas de tout le monde. Ici aussi, les touristes sont foule et se concentrent aux cols routiers, laissant le doute quant à leur venue. On est le 21 juillet, le 100ᵉ jour qu’on marche, 100 jours à dormir sur un tapis de sol, à faire une toilette 1 jour sur 3, à monter et démonter les tentes. Cent jours, c'est court et long à la fois, 100 jours ça représente à ce moment-là, l’ambivalence que l’on partage tous : l’envie insatiable de finir et la tranquillité de cette vie quotidienne en montagne. Malgré tout, nous continuons d’arpenter les sentiers italiens sans croiser grand monde et en faisant plus d’une fois des rencontres chaleureuses. On emporte dans nos sacs la recette de plusieurs Grappa, alcool typique italien réalisé en faisant macérer des plantes dans de l’alcool blanc de raisin. On emporte aussi pleins de connaissances sur les champignons comestibles et non comestibles, sur les bolés, les girolles, les polypores, sur ceux qu’on trouve au bord des chemins et ceux qu’on doit chercher pendant 4h en laissant Jules tout seul (comme un petit sentiment de vécu). Mais surtout, on emportera les souvenirs de ces vues et ces montagnes intimidantes…

Transalpins, Traversée des Alpes
Transalpins, Traversée des Alpes

Du 26 juillet au 3 août, ciao ragazzi

Nous entrons dans la région la plus à l’est des Alpes italiennes: le Frioul-Vénétie julienne. C’est une région dont on avait très peu entendu parler que ce soit pour ces villes et ces paysages ou bien vis-à-vis de la problématique du loup. Ici, les ours, les lynx et les chacals se mêlent au loup et on ne sait pas vraiment lequel est le plus problématique. C’est une région qui est très peu touristique en comparaison des Dolomites. Nous croisons quelques motards par-ci par-là sur les sentiers, mais surtout, nous rencontrons des locaux toujours partants pour discuter, et qui plus est en français ! Nous apprenons qu’un grand nombre d’italiens du Frioul et de la Vénétie ont immigrés en France dans les années 1950, au moment de la construction des villes nouvelles autour de Paris. Depuis, plusieurs générations après, leurs enfants ou petits enfants reviennent ici en Italie pour y vivre ou simplement en vacances dans leur maison familiale. L’ambivalence entre l’envie de finir et l’envie de profiter de ce train de vie s’est intensifiée les derniers jours en Italie. À deux jours de passer la frontière Slovène, nous racontons notre périple à un éleveur de vaches, qui nous accueille dans sa ferme le temps de prendre l’apéro et de s’abriter de l’orage. Lui aussi parle français, un français très approximatif, mais qui suffit pour qu’on se comprenne mutuellement. Il nous explique que depuis des années, il recueille les récits des aventures des personnes qui passent à sa ferme, et effectivement, on aperçoit sur les murs pleins de photo que les personnes lui ont envoyés et on se demande si nos photos apparaîtront ici aussi. Le lendemain, nous repartons, et le remercions pour son accueil. Après nous avoir demandé de lui envoyer un petit récit de transalpins, il nous salue et dit « Ciao ragazzi, in bocca al lupo ». On a compris à ce moment-là la signification de « ciao ragazzi » et pourquoi tout le monde le disait. Pour ce qui est de la suite, il ne nous souhaitait pas de finir dans la gueule du loup, mais plutôt bonne chance pour la fin.

Transalpins, Traversée des Alpes

Quatrième chapitre - Les Alpes Slovènes, la consécration

Du 4 au 11 août, l’intensité du Triglav

Si les Alpes Juliennes ne vous disent rien, imaginez-vous de basses vallées encaissées entourées de chaînes de montagnes rocailleuses et escarpées. On comprend mieux pourquoi on nous a souhaité bonne chance. La dernière journée en Italie était du genre longue et fastidieuse alors qu’on la pensait courte et plaisante. Notre première nuit en Slovénie aussi était imprévue. Sans eau aux environs, on décide d’aller en demander à une ferme repérée sur la carte, motivés par la possibilité d’une interview. On obtient de l’eau, mais pas d’interview. Fatigués par la journée, on monte notre campement dans un alpage à côté de la ferme. Et alors que nous nous apprêtons à nous coucher, deux enfants de la ferme viennent voir Joe pour lui soutirer habilement 3€. En effet, il est interdit en Slovénie de bivouaquer, dans les parcs naturels, mais aussi en dehors. Pour la faire courte, on est dans l’illégalité et ça les enfants le savent bien. Mais Joé ne démord pas, et renvoie les enfants sans ces 3 précieux euros. On s’endort finalement, mais réveillés un peu brutalement à 6h du matin, par les mêmes enfants qui crient : « GREMO ! GREMO ! », accompagnés du troupeau de vaches. Sur le moment, on ne savait pas si on hallucinait les cris ou s'ils faisaient exprès pour nous réveiller. En tout cas, c'était réussi, mais sans nous déplaire, la fin est proche, il fait beau et les montagnes sont grandioses. On a passé les jours d’après à remonter la vallée de la Soča jusqu’au petit village de Trenta, départ pour le sommet du Triglav, emblème de la Slovénie. Mais n’étant pas équipés pour son ascension, nous avons décidé de traverser le parc national par la vallée des sept lacs, qui se termine par le grand lac de Bohinj. Une fin digne de ce nom, ponctuée par une baignade pour clore ces quatre mois de marche. Mais la traversée n’est pas tout à fait finie, nous devons rejoindre Ljubljana, où nous attendent nos derniers acteurs à interviewer. Nous sommes le 7 août et le timing est un peu serré… Alors, nous finissons la petite centaine de kilomètres en bus pour rejoindre la capitale, en évitant le cagnard et les 30°C de ce début août. Trois interviews plus tard et une soirée mémorable à Ljubljana, nous voilà prêts pour les 13h de bus qui nous séparent de Nice, point de départ de cette aventure.

Transalpins, Traversée des Alpes
Dernière nuit de la traversée, dernier bivouac au 115ᵉ jour.
Transalpins, Traversée des Alpes
4h du matin, Ljubljana, on s’en va prendre le bus qui nous ramène à Nice.

Prologue

9 septembre 2024, 1 mois après notre retour en France

Palaiseau, 9h, c’est la reprise des cours et le retour à un quotidien bien moins physique mais aussi bien moins calme. C’est aussi le retour à la vie en société, à l’effervescence des interactions sociales et de la vie étudiante. Et franchement, on a mis quelque temps à s’y habituer à nouveau. Ah non… Il y a bien deux choses auxquelles on a vite repris goût : une douche et un bon lit. On s’est aussi vite replongé dans le projet après ce mois de pause, à poser nos têtes. La dernière phase des Transalpins débute maintenant et se terminera dans un an. Cette dernière phase, on la consacre au montage de notre documentaire. Et sans vous le cacher, il y a beaucoup de travail, peut-être plus qu’avant de partir, on ne sait pas trop. En tout cas, ce que l’on sait, c’est qu’on a 70 heures de vidéos quotidiennes et d’interviews à dérusher. Ces 70 heures deviendront à terme un film de 54 minutes. Pour ce faire, on travaille tous les trois avec Margot, notre super monteuse qui nous a rejoint sur cette dernière phase et qui sera chargée du montage final.

Rendez-vous donc début septembre 2025 pour la première projection de notre documentaire, retraçant notre expédition et notre compréhension de la problématique du loup par les acteurs de nos montagnes.


Merci pour cette lecture !


Jules, Joé, Joseph